La ministre de la Santé et la ministre des Comptes publics étaient prêtes à tout pour garder le pouvoir de décider des plafonds sur les remises des médicaments génériques. En vain. Les députés se sont tous rangés du côté des pharmaciens.
Il s’est passé quelque chose à l’Assemblée nationale ce matin du samedi 8 novembre, lors des débats en séance publique sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. Pendant plus de 30 minutes, les députés ont soutenu, contre le gouvernement, les amendements visant à supprimer définitivement l’arrêté du 4 août 2025 réduisant le plafond des remises sur les génériques, celui-là même qui a conduit les pharmaciens dans la rue le 18 septembre.
L’objet de la discorde n’était pas tant le retour à un plafond de 40 % sur les remises, mais plutôt sur la question : qui a le pouvoir de décider de ces plafonds ? Depuis 2014, c’est le pouvoir réglementaire (gouvernement, ministères, autorités administratives…) qui décide du taux des remises sur les génériques, avec la possibilité de fixer un taux de manière unilatérale… comme avec l’arrêté du 4 août. Pour éviter ces « dérives », les députés de tous les bords politiques ont déposé et défendu des amendements visant à rendre ce pouvoir au législateur. En d’autres termes, les amendements des députés visent à protéger davantage les officines.
« Méchant gouvernement » contre « gentils pharmaciens »
Une position unanime de l’Assemblée nationale qui déplaît à Stéphanie Rist. La ministre de la Santé avait, en début de semaine dernière, demandé aux syndicats de pharmaciens d’intervenir auprès des parlementaires pour qu’ils rejettent ces amendements. « Vos amendements, en fixant le plafond dans la loi, risquent de rigidifier la situation, quand nous pensons plutôt qu’il nous faut travailler avec tous les acteurs à partir d’un diagnostic partagé », tente-t-elle de justifier devant les députés en séance, faisant allusion à la mission IGAS/IGF sur la transparence des prix du médicament et sur les flux financiers, dont les auditions viennent tout juste de commencer. Mais c’est la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin qui se montre la plus offusquée : « Il n’y a pas d’un côté le méchant gouvernement et de l’autre les gentils pharmaciens », lance-t-elle au micro de l’Assemblée.
Amélie de Montchalin essaie par tous les arguments de défendre le gouvernement. « Personne n’a rappelé que les prix du médicament avaient baissé. Les industriels ont ainsi fourni le plus gros de l’effort collectif dans la chaîne du médicament. Ne donnons pas l’impression que nous cherchons à sauver la sécurité sociale en faisant tout reposer sur les pharmaciens », commence-t-elle, se défaussant même sur la genèse de l’arrêté du 4 août : « Au mois de juin, le comité d’alerte de l’ONDAM a enjoint au gouvernement de prendre des mesures d’urgence pour éviter que le déficit de la Sécurité sociale n’aille complètement dans le décor. » « Un exemple typique de coup de rabot bête et méchant », répond le rapporteur général Thibault Bazin.
Amélie de Montchalin poursuit : « Dans le PLFSS pour 2026 tel que proposé par le gouvernement, les pharmaciens bénéficieront de plus de 45 millions d’euros de soutien au titre de l’avenant conventionnel de 2024 », dressant ensuite une liste à la Prévert des revalorisations apportées par l’avenant 1 à la convention pharmaceutique. De la mauvaise foi ? « La convention actuelle prévoit déjà plusieurs des dispositifs que vous avez évoqués, madame la ministre de l’action et des comptes publics », répond le rapporteur général, évoquant également les difficultés financières et démographiques de la pharmacie d’officine.
Résultat : les députés ont adopté à la quasi-majorité (206 « pour », 4 « contre ») les amendements qui rendent le pouvoir de décision sur les taux de remises au législateur. Le plafond sur les remises génériques à 40 % est également restauré. Un taux à 50 % a même été avancé par certains députés. « J’ai beaucoup échangé avec la profession cet été : elle demande simplement à ce que l’on en revienne à la situation antérieure. Soyons donc raisonnables et restons-en à 40 % », temporise le rapporteur général.
Rien n’est pourtant définitif : les députés doivent encore procéder au vote de la partie « Dépenses » du PLFSS et de l’ensemble du texte, mais encore faut-il qu’ils en aient le temps d’ici mercredi 12 novembre au soir. Dans le cas contraire, le gouvernement s’est engagé à porter devant le Sénat le texte amendé par les députés. Même avec les modifications sur le plafond des remises génériques ?
Justice
Exit les médicaments à prescription obligatoire sur le site de Livmed’s
Tensions d’approvisionnement
Disponibilité des psychotropes : où en est-on ?
Une application de l’Ordre
Le Dossier pharmaceutique rejoint Mon espace santé
Rapport
Dispensation à l’unité : la Cour des comptes dit oui