Démographie professionnelle

Pharmaciennes, vues de profil

Publié le 22/02/2010
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La profession continue de se féminiser, en particulier dans le secteur hospitalier et en officine, mais les femmes occupent surtout des postes d’adjointes. Conciliant souvent vie professionnelle et vie de famille, les pharmaciennes montrent une belle maîtrise de l’art du compromis.
En 2030, 84,5?% des adjoints seront des adjointes

En 2030, 84,5?% des adjoints seront des adjointes
Crédit photo : PHANIE

COMME le montre le dernier bilan démographique de l’Ordre des Pharmaciens, doucement mais sûrement, la proportion des femmes dans la profession continue d’augmenter. Au 1er janvier 2009, elles représentaient 65,84 % des pharmaciens en activité contre 65,65 % l’année précédente et 63,8 % en 2004. On note cependant des différences notables entre les branches d’activité.

La grande majorité (81,77 %) des pharmaciens salariés (section D : adjoints d’officine, gérants, remplaçants, mutualistes…) sont des femmes. Elles constituent aussi plus des 3/4 des effectifs de la section H (pharmaciens des établissements de santé, publics et privés) : 76,9 %, soit 70 % des plein-temps et 81 % des temps partiels. Dans les sections B (pharmaciens de l’industrie), E (DOM-TOM) et G (pharmaciens biologistes exerçant dans les secteurs public et privé), les femmes sont également majoritaires, mais dans une moindre proportion : respectivement 56,07, 55,61 et 55,62 %. Seule la section C (distribution en gros) compte encore plus d’hommes que de femmes mais, là aussi, les choses changent et ces professions tendent à se féminiser.

54 % de femmes titulaires.

Cette féminisation, amorcée en 1980-1981, s’est poursuivie à un rythme soutenu (environ 1/2 point par an) durant les décennies soixante-dix et quatre-vingt, mais s’est ralentie un peu depuis les années quatre-vingt-dix. La tendance ne devrait toutefois pas s’inverser de sitôt puisqu’en 2008, les femmes représentaient presque 70 % (69,8 % exactement) des premières inscriptions à l’Ordre des Pharmaciens. Ce qui devrait encore contribuer à rajeunir la moyenne d’âge des pharmaciennes, déjà inférieure à celle des pharmaciens. En 2004, alors que 57 % des pharmaciens de plus de 50 ans étaient des femmes, elles représentaient 65 % des 35-50 ans et 74 % des moins de 35 ans. L’an dernier, la moyenne d’âge des pharmaciens salariés regroupés dans la section D, la plus féminisée, était de 42 ans et 11 mois alors que celle de l’ensemble de la profession, hommes et femmes toutes sections confondues, était de 45 ans et 11 mois.

Même chez les pharmaciens titulaires d’officine (section A), le pourcentage de femmes, majoritaires depuis 1981, a augmenté, mais très légèrement : 54,22 % en 2009 contre 53,67 % en 2005. Les opportunités tendent en effet à se limiter et, dans ce contexte, les progressions de carrière profitent moins aux femmes. Elles occupent ainsi plus souvent des postes d’adjoints dont le nombre par officine a augmenté au cours des dix dernières années en même temps que le nombre des grosses pharmacies. La féminisation de la profession a donc servi en quelque sorte de « variable d’ajustement » et devrait continuer de le faire. Selon des projections de la Drees (Direction de la recherche des études, de l’évaluation et des statistiques), le taux de féminisation des adjoints d’officine passerait à 84,5 % d’ici à 2030.

Vie de famille.

Il y a sans doute plusieurs raisons au fait que les femmes choisissent plutôt d’être salariées en officine ou dans le secteur hospitalier. Mais la plus fréquemment invoquée est la possibilité de concilier métier et vie de famille. En officine, les femmes apprécient de pouvoir s’arrêter quelques années pour élever leurs enfants et reprendre ensuite, quel que soit leur âge. Elles savent aussi que changer de ville pour suivre un mari dont la carrière évolue ou change n’est pas un problème et qu’elles peuvent retrouver un job à peu près au même salaire.

Elles ont également la possibilité de travailler à temps partiel. « Elles préfèrent gagner moins pour donner plus de temps à leur famille », explique Mme B., installée en banlieue parisienne. « En général, une fois qu’elles ont des enfants, elles choisissent de travailler 25 à 30 heures par semaine - et non pas 55 ou 60 comme les titulaires -, souhaitent avoir un samedi de libre sur deux, le mercredi entier ou la demi-journée, une semaine de vacances en février, une autre à Pâques et 4 semaines en été. Dans leur métier, les femmes aiment avant tout le contact avec les patients et le conseil, beaucoup moins le versant administratif et gestionnaire, très chronophage, et sont rarement prêtes à lui sacrifier leur vie d’épouses et de mères ».

› ÈVE OUDRY

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2727