Climat et écologie microbienne

Existe-t-il une météo des virus ?

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Publié le 08/12/2022
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Changement de température, froid sec, temps humide… Les études scientifiques s'intéressent aux critères environnementaux et climatiques favorisant la prolifération des virus. Malgré la littérature florissante sur le sujet, rien n'est limpide ! Explications du Dr Anne Mosnier, médecin généraliste et épidémiologiste, au sein d'Open Rome (Réseau d'observation des maladies et des épidémies), à Paris.

Certains virus affectionnent les climats froids. D'autres se réveillent lorsqu'il fait chaud, sec ou humide. Épidémiologistes et virologues étudient leurs conditions de prolifération de près. « Malgré les nombreux travaux sur le sujet, les réponses ne sont pas toujours claires. Par ailleurs, le SARS-CoV-2 a balayé nos connaissances sur le sujet. De fait, il a pu être jusque-là présent toute l'année, quel que soit le climat », souligne le Dr Anne Mosnier. Cette situation changera peut-être à l'avenir. Mais une chose est sûre : pour le moment, la chaleur n'empêche pas le Covid-19 de circuler. Néanmoins, d'après certaines études observationnelles autour du Covid-19, l'ensoleillement serait protecteur. Le fait que le virus s'amenuise lorsque le soleil est au beau fixe n'est pas forcément lié aux fortes températures. Le Covid-19 serait, en effet, sensible aux UV.

Des virus saisonniers…

Dans les pays tempérés – avec des saisons marquées - comme la France, d'autres virus s'installent de façon saisonnière. Exemples frappants : la grippe affectionne l'hiver ; le virus respiratoire syncytial VRS (responsable de bronchiolite chez le nourrisson) se révèle dès la fin de l'automne et perdure en hiver. Le rhinovirus, quant à lui, pointe son nez en automne. « Mais dans les pays moins tempérés, avec moins de saisonnalité, la grippe par exemple, peut être présente à n'importe quelle période de l'année. Dans ces conditions, si les températures et l'humidité ont sûrement un impact dans la prolifération des virus, leur rôle n'est pas si clair que cela ! », note le Dr Mosnier.

…qui peuvent perdurer par temps chauds

Concernant la grippe, il est certain que le virus résiste bien au froid et beaucoup moins au chaud. Mais cette caractéristique ne l'empêche pas de circuler en période de fortes chaleurs. « Actuellement, la grippe est présente dans les Antilles alors qu'il y fait chaud. Quoi qu'il en soit, les pharmaciens devraient indiquer à leurs patients, quel que soit le temps, de bien respecter les gestes barrières. Il s'agit d'une précaution à prendre toute l'année pour réduire le risque de contaminations. En 2020 et 2021, les gestes barrières adoptés en raison du Covid-19 avaient permis de diminuer la circulation des autres virus. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas », ajoute le Dr Mosnier.

Le froid favorise les contaminations

Autre paramètre à prendre en compte : l'hôte. Plus notre système immunitaire est résistant, mieux on se défend vis-à-vis des différents virus. « Le froid est un facteur de baisse d'immunité. Cela explique, entre autres, le fait qu'il favorise les contaminations. Par ailleurs, lorsqu'il fait froid, on a moins le réflexe d’aérer nos lieux de vie. À l’inverse, un climat sec a tendance à limiter l'impact des virus : plus il fait sec, plus ce qu'on va propager dans l'air quand on est malade - via les gouttelettes - séchera vite. Dans ces conditions, les virus sont moins contaminants que par temps humide », précise le Dr Mosnier.

Vacciner malgré le retard de la saison froide

L'impact de l'hiver tardif, en matière de prolifération des virus, n'est pas très clair. Certains virus circulent au sein de la population, quelle que soit la météo. Concernant la grippe, l’arrivée du froid joue certes, probablement, un rôle dans son installation au sein de la population. « Mais une fois installé, il peut faire chaud ou froid, le virus continuera à circuler », assure le Dr Mosnier. Par ailleurs, l’épidémiologiste pointe du doigt les risques liés à un hiver qui se fait attendre et, plus globalement, au réchauffement climatique. « Le fait qu'il fasse plus chaud que d’habitude n'est pas une raison pour ne pas se faire vacciner contre la grippe et le Covid-19 ou pour effectuer cet acte plus tard. Les virus grippaux sont présents, c’est maintenant qu’il faut que les personnes à risque se fassent vacciner (et effectuent, si nécessaire, leur rappel Covid-19) », conclut le Dr Mosnier.

Hélia Hakimi-Prévot

Source : Le Quotidien du Pharmacien