La proposition d’un plafond de remise sur les génériques à 33 % (en plus d’un plafond à 15 % sur les biosimilaires), applicable dans les prochaines semaines, n’a pas convaincu les syndicats de pharmaciens. Ce 24 juillet, le ministère de la Santé se dit finalement prêt à négocier avec Bercy et Matignon pour obtenir un plafond légèrement plus avantageux, à 34 %. Pour les syndicats, il faut aussi réussir à faire reculer l’exécutif sur un autre point : l’inscription dans le prochain arrêté d’un plafond à 20 % pour les remises sur l'ensemble des médicaments, qui serait cette fois applicable à partir du 1er janvier 2027…
Le « 33-15 » c’est non ! À l’issue de son conseil d’administration ce 24 juillet, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) a refusé d’accepter un plafond de remise à 33 % sur les génériques et à 15 % pour les biosimilaires, comme annoncé la veille par le ministère de la Santé. « À une courte majorité, nous avons décidé de faire à la place une contre-proposition, soit un « plan pharmacie » global, qui permettrait de sortir de cette crise par le haut », explique Philippe Besset, président du syndicat. La FSPF demande précisément trois mesures : « passer à 34 % pour le plafond de remise sur les génériques et 15 % pour les biosimilaires, l’envoi d’une lettre de mission dès le mois d’août au directeur général de la CNAM pour commencer des travaux visant à revoir le mode de rémunération du pharmacien pour qu’il repose davantage sur les actes et non sur le volume, et enfin, l’abandon du « 20-20 » sur les plafonds de remise sur les génériques et biosimilaires, prévu pour 2027 », liste Philippe Besset.
Un pari
En effet, « dans l’arrêté qui doit être publié avant le 1er août, le gouvernement veut inclure une autre mesure : mettre en place des plafonds à 20 % pour les génériques comme pour les biosimilaires. Ils entreraient en application au 1er janvier 2027. C’est parfaitement inacceptable », dénonce Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO). « La ministre Catherine Vautrin s’est engagée à essayer d’obtenir ce plafond à « 34-15 », ce n’est pas certain qu’elle y parvienne. De même pour l’abandon du « 20-20 », reconnaît Philippe Besset. Il faut être conscient que si notre proposition n’est pas acceptée, nous risquons de nous voir imposer un arrêté avec un plafond de remise à 30 % pour les génériques, applicable dès le 1er août. Si c’est le cas, il sera difficile de changer ce texte ensuite, même si le gouvernement actuel change », explique Philippe Besset. Un pari risqué que le président de la FSPF va soumettre à son assemblée générale le 30 juillet. « Il faut que tout le monde, pharmaciens, groupements, en passant par le Premier ministre… accepte ce « plan pharmacie » que nous défendons », plaide Philippe Besset.
L’unité syndicale derrière ce plan proposé par la FSPF est toutefois loin d’être acquise. Du côté de Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), on est toujours déterminé à obtenir le maintien du plafond de remise à 40 %. « Le ministère voudrait que l’on accepte cette proposition (34-15) et que l’on mette fin à nos actions de mobilisation, parce que la grève des gardes, les manifestations et fermetures que nous envisageons, ne plus faire de préparation des doses à administrer… tout cela, ça les embête. Le ministère nous a clairement dit qu’il était prêt à aller chercher un ultime arbitrage, mais que cette fois nous ferions mieux de l’accepter, sinon nous pourrions avoir encore moins. » Comme l’admet cependant Laurent Filoche, « obtenir le maintien d’un plafond à 40 % pour les génériques, cela semble difficilement atteignable aujourd’hui. Néanmoins, notre mobilisation commence à porter ses fruits donc il faut continuer, on peut encore aller jusqu’à 35 % ou 36 % selon moi. Ce que nous demandons, surtout, c’est l’abandon du « 20-20 » envisagé pour 2027 et il ne faut pas que le réseau perde un euro dans l’opération. Pour cela, il faut une revalorisation de nos missions. »
Un avenant 2 dans la balance
Le président de l’USPO a lui aussi demandé au ministère l’ouverture de négociations avec l’assurance-maladie autour d’un avenant 2 à la convention pharmaceutique. « Il est temps de modifier notre mode de rémunération, qui est trop lié au volume, au « 1 euro à la boîte » », souligne-t-il. Un chantier que le ministère semble prêt à ouvrir, mais « parce que les promesses n’engagent que ceux qui y croient », insiste Pierre-Olivier Variot, hors de question de se contenter de paroles. « Pour être sûr que ces négociations auront lieu, il nous faut une lettre de cadrage, envoyé par le ministère à l’assurance-maladie », exige-t-il lui aussi. « On veut nous donner de nouvelles missions, c’est bien, mais hors de question que ces missions servent à compenser une perte d’argent sur un autre domaine. Le cabinet du ministère de la Santé nous a expliqué ce jeudi que des baisses de prix sur les génériques seraient actées dans les prochaines semaines (le gouvernement compte réaliser 100 millions d’euros d’économies supplémentaires sur ces médicaments) et qu’il faudrait donc inévitablement une baisse du plafond de remise. Je ne vois pas pourquoi l’un obligerait l’autre, il y a bien eu des baisses de prix successives ces dernières années sans que l’on ne touche au plafond ! Les remises sur les biosimilaires n’étaient pas censées venir compenser une baisse des remises sur les génériques, ce n’est pas ce qui nous avait été expliqué au départ », veut-il également rappeler.
Pour l’USPO, pas question en tout cas de renoncer à la mobilisation et à l’objectif de conserver ce plafond à 40 % pour le moment. « Si, à terme, le plafond sur les remises génériques passe de 40 à 20 %, c’est 600 millions d’euros de perte pour le réseau. Il faudrait alors que ces 600 millions soient redonnés aux pharmaciens par d’autres rémunérations », détaille Pierre-Olivier Variot. Dans les départements, la colère est en tout cas loin de retomber. Dans les Alpes-Maritimes, ou encore en Occitanie, des pharmaciens adhérents à l’USPO préparent notamment une journée de grève dès le 16 août…