Si la dexaméthasone s’est imposée comme traitement standard des formes sévères de Covid-19, quel est son mode d’action ? C’est ce qu’ont cherché à savoir des scientifiques de l’Inserm, de l’hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HP) et de l’université Paris Cité dans une nouvelle étude, publiée le 25 septembre, dans Arteriosclerosis, Thrombosis, and Vascular Biology.
La même équipe avait déjà observé dès 2020, dans un article publié dans Angiogenesis, que le Sars-CoV-2, en plus de l’atteinte des poumons, provoquait une endothéliopathie, soit un dysfonctionnement de la paroi interne des vaisseaux sanguins, menant à des microthromboses souvent fatales.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont tenté de comprendre l’effet de différents traitements sur les vaisseaux sanguins et la coagulation dans les formes sévères de Covid-19. Ils ont suivi 375 patients atteints de Covid-19, dont 44 en réanimation pour syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), à l’hôpital européen Georges-Pompidou. Les patients atteints de SDRA étaient à la fois sous dexaméthasone – ce corticoïde dont l’efficacité a été prouvée pour les formes graves de Covid-19 associées à des complications respiratoires – et sous héparine non fractionnée (HNF) à but thérapeutique (anticoagulant).
Diminution de la production de thrombine
23 des 44 patients SDRA traitées par dexaméthasone et HNF voyaient plusieurs marqueurs d’endothéliopathie diminuer au cours d’une semaine. Afin de différencier l’effet de l’HNF et de la dexaméthasone, les chercheurs ont utilisé un test de génération de thrombine. Résultat : en présence d’un cocktail de cytokines pro-inflammatoires (pour simuler l'orage cytokinique du Covid-19 sévère), la stimulation des cellules formant des colonies endothéliales par la dexaméthasone diminuait significativement le potentiel de thrombine endogène (ETP). Cela n’était pas le cas avec l’HNF.
En parallèle, dans une autre cohorte de 331 patients atteints de Covid de gravité variable, la stimulation des cellules formant des colonies endothéliales avec le plasma de 87 patients atteints de SDRA a montré une ETP significativement plus élevée par rapport à 75 patients non SDRA. Enfin, 94 patients atteints de SDRA traités à la dexaméthasone avaient une ETP significativement plus faible par rapport à 75 patients SDRA non traités à la dexaméthasone.
Les chercheurs concluent que la dexaméthasone réduit significativement les marqueurs de lésion endothéliale et la production de thrombine. Il protège ainsi directement les cellules endothéliales face à l’orage inflammatoire provoqué par le virus, alors que l’héparine n’a pas cet effet. « Notre modèle expérimental nous a permis de montrer que la dexaméthasone agit non seulement comme anti-inflammatoire général mais aussi comme un protecteur direct des vaisseaux », explique le Pr David Smadja, coordinateur de l’étude, dans un communiqué.
Ce résultat renforce au passage l’idée que l’inflammation vasculaire est au cœur des complications du Covid, bien au-delà des simples atteintes pulmonaires. Enfin, il montre que l’intensité des anomalies de la coagulation induite par le plasma des patients est fortement corrélée au risque de décès.
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