Ne jetez plus le contenu de vos poubelles jaunes trop vite : elles pourraient bien contenir un trésor. Une équipe de l’université d’Édimbourg, en Écosse, est parvenue à produire du paracétamol grâce à une souche génétiquement modifiée d’Escherichia coli. Le rapport avec les déchets recyclables ? Il réside dans le substrat utilisé : du polytéréphtalate d’éthylène (PET), ce plastique qu’on utilise notamment pour les bouteilles de boissons gazeuses et les emballages jetables et que l’on retrouve massivement dans nos poubelles. Grâce à cette matière première inattendue, les petites bactéries ont réussi à synthétiser du paracétamol. Mais ce n’est pas tout. Elles se sont également montrées capables de produire de l’acide para-aminobenzoïque (PABA), une molécule largement utilisée par l’industrie pharmaceutique, entrant notamment dans la composition de crèmes solaires ou de certains médicaments. On pourrait néanmoins s’inquiéter pour la santé des souches d’E. coli, qui pourraient frôler l’indigestion à manger du plastique. Mais au contraire, la production de ces métabolites d’intérêt n’est pas toxique pour les bactéries modifiées, soulignent les chercheurs, qui ont publié leur étonnante découverte dans la revue « Nature Chemistry ».
Des résultats très prometteurs, donc, tant l’industrie du médicament a du chemin à parcourir pour atteindre ses objectifs de décarbonation. Aujourd’hui, le paracétamol est principalement produit à bas coûts à partir de dérivés du pétrole, dans des usines asiatiques, souvent peu soumises aux normes écologiques en vigueur en Europe. Produire des médicaments en donnant une seconde vie aux déchets plastiques, plutôt qu’avec du pétrole importé du bout du monde ? L’idée est séduisante, mais malheureusement loin d’être réaliste. Le principal obstacle réside dans les quantités que les bactéries ont été capables de produire, bien en deçà du seuil industriel, regrettent plusieurs scientifiques dans un commentaire accompagnant l’étude. Pas de risque de surproduction, donc, pour notre bactérie. Et pourtant, le besoin est là : la France consomme à elle seule plus de 375 millions de boîtes de paracétamol chaque année.