Les résultats d’une enquête néerlandaise montrent que certaines populations ont déjà recours à l’usage de la doxycycline en prophylaxie contre les infections sexuellement transmissibles. Et ce alors que cet antibiotique n’est pas encore recommandé officiellement dans cette indication.
Aux Pays-Bas, un quart des personnes transgenres et des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) aurait déjà recours à la doxyPrep, c’est-à-dire à la prise régulière de doxycycline en prophylaxie pré-exposition des infections sexuellement transmissibles (IST), ou à la doxyPEP pour la post-exposition. Ces résultats proviennent d’une enquête réalisée aux Pays-Bas et publié dans la revue « Surveillance », éditée par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC).
Au total, 1 633 personnes ont répondu à un questionnaire en ligne. 22 % affirmaient avoir déjà eu recours de manière informelle et sans prescription à la doxyPEP ou la doxyPrEP, 15 % affirmaient même y avoir eu recours récemment, et 65 % déclaraient avoir la ferme intention d’en prendre. Ils étaient 246 à déclarer avoir utilisé la doxycycline, dont 114 en prophylaxie post-exposition (PEP), 71 en prophylaxie pré-exposition (Prep) et 61 en combinant les deux. Des chiffres en augmentation, en comparaison avec ceux d’une étude similaire menée à Amsterdam en 2021, ce qui éveille les craintes de la communauté médicale.
Outre le recours hors prescription à un antibiotique, l’étude rapporte que, d’une part, d’autres antibiotiques (l’azithromycine, la ciprofloxacine et l’amoxicilline) ont également été employés et, d’autre part, certains usagers ne se souvenaient pas de l’antibiotique pris. « C’est une mauvaise idée, s'inquiète le Pr Jean-Michel Molina, chef de service Maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Saint-Louis à Paris. Il faut uniquement utiliser la doxycycline qui pose moins de problèmes de tolérance. Les autres antibiotiques ont plus d’impact sur le microbiote et présentent plus de risque de résistance, car ils sont plus largement utilisés dans d’autres indications. C’est la raison pour laquelle il faut accompagner les choses plutôt que de laisser les gens sans repère. »
Bien que l’intérêt de la doxyPEP/Prep soit acté (une étude française a montré que les participants recevant 200 mg de DoxyPEP dans les 24 heures après l’exposition voyaient le risque d’IST diminué de 47 % par rapport au groupe témoin sans prophylaxie), les autorités sanitaires demeurent prudentes sur sa généralisation. Les Néerlandais, de leur côté, ont déclaré ne pas recommander la doxycycline en prophylaxie des IST. Une position similaire à la France, où la Haute Autorité de santé (HAS) a estimé qu'il était seulement « possible d’envisager » d’y recourir et uniquement dans quelques cas très précis.